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LUNDI 6 JANVIER – MERCREDI 8 JANVIER

 

MIKAEL AVAIT CONTINUÉ à lire jusqu’au petit matin, puis s’était levé tard le jour des Rois. Une Volvo bleu marine, dernier modèle, était garée devant la maison de Henrik Vanger. Au moment où Mikael posait la main sur la poignée de la porte d’entrée, celle-ci s’ouvrit et un homme d’une cinquantaine d’années sortit. Ils faillirent entrer en collision. L’homme semblait pressé.

— Oui ? Puis-je vous aider ?

— Je viens voir Henrik Vanger, répondit Mikael.

Le regard de l’homme s’adoucit. Il sourit et tendit la main.

— Vous devez être Mikael Blomkvist, l’homme qui va aider Henrik à réaliser la chronique familiale ?

Mikael hocha la tête et serra la main. Henrik Vanger avait apparemment commencé à répandre l’histoire censée expliquer la présence de Mikael à Hedestad. L’homme était en surcharge pondérale – résultat de nombreuses années de stress dans des bureaux et des salles de réunion – mais Mikael remarqua immédiatement sur son visage des traits qui rappelaient Harriet Vanger.

— Je m’appelle Martin Vanger, confirma-t-il. Soyez le bienvenu à Hedestad.

— Merci.

— Je vous ai vu à la télé il y a quelque temps de cela.

— J’ai l’impression que tout le monde m’a vu à la télé.

— Wennerström n’est pas… très populaire dans cette maison.

— C’est ce que m’a dit Henrik. J’attends la suite des événements.

— Il m’a expliqué l’autre jour qu’il vous avait engagé. Martin Vanger éclata de rire. Il m’a dit que c’était probablement à cause de Wennerström que vous aviez accepté ce boulot.

Mikael hésita une seconde avant de se décider à parler franc.

— J’avoue que c’est une des raisons. Mais pour tout dire, j’avais besoin de m’éloigner de Stockholm, et Hedestad est apparu au bon moment. Je crois. Je ne peux pas faire comme si le procès n’avait jamais eu lieu. Il va falloir que j’aille en prison.

Martin Vanger hocha la tête, soudain sérieux.

— Vous avez la possibilité de faire appel ?

— Dans mon cas, ça ne changera rien. Martin Vanger consulta sa montre.

— Je dois être à Stockholm ce soir, je me dépêche. Je serai de retour dans quelques jours. Il faudra que vous passiez dîner. J’ai très envie d’entendre ce qui s’est réellement passé au cours de ce procès.

Ils se serrèrent la main avant que Martin Vanger descende et ouvre la portière de la Volvo. Il se retourna et lança à Mikael :

— Henrik est à l’étage. Allez-y.

 

 

HENRIK VANGER ÉTAIT ASSIS dans le canapé de son cabinet de travail avec Hedestads-Kuriren, Dagens Industri, Svenska Dagbladet et les deux journaux du soir sur la table devant lui.

— J’ai croisé Martin sur le perron.

— Le voilà parti au secours de l’empire, répondit Henrik Vanger en brandissant le thermos. Café ?

— Volontiers, répondit Mikael. Il s’assit en se demandant pourquoi Henrik Vanger avait l’air de s’amuser tant.

— Je vois qu’on parle de toi dans le journal.

Henrik Vanger poussa l’un des journaux du soir, ouvert sur le titre « Court-circuit journalistique ». L’article était écrit par un ancien chroniqueur du Finansmagasinet Monopol, connu comme le parfait insipide en costard-cravate, expert en l’art de dénigrer avec mépris tous ceux qui s’étaient engagés pour une cause ou qui avaient relevé la tête.

Avec lui, féministes, antiracistes et militants de l’environnement étaient assurés d’en prendre pour leur grade. Le bonhomme n’était cependant pas connu pour émettre lui-même la moindre opinion controversable. Maintenant il s’était apparemment converti en critique ; plusieurs semaines après le procès de l’affaire Wennerström, il focalisait son énergie sur Mikael Blomkvist, qu’il décrivait, en le nommant, comme un véritable imbécile. Erika Berger était dépeinte comme une potiche des médias parfaitement incompétente :

La rumeur court que Millenium est en train de sombrer, bien que sa directrice soit une féministe en minijupe et qu’elle nous fasse des mines à la télé. Le journal a survécu plusieurs années durant sur l’image que la rédaction a réussi à vendre – celle de jeunes reporters avides d’enquêtes et démasquant les forbans du monde des affaires. La ficelle commerciale marche peut-être auprès de jeunes anarchistes désireux d’entendre ce message, mais elle ne fonctionne pas au tribunal. Et Super Blomkvist vient d’en faire l’expérience.

Mikael vérifia sur son portable s’il avait eu un appel d’Erika. Il n’y en avait pas. Henrik Vanger attendait, silencieux ; Mikael réalisa soudain que le vieil homme avait l’intention de lui laisser le soin de rompre le silence.

— C’est un crétin, dit Mikael.

Henrik Vanger rit, mais ajouta un commentaire dépourvu de tout sentimentalisme :

— Possible. Mais ce n’est pas lui qui a été condamné par la justice.

— C’est vrai. Et il ne le sera jamais non plus. Il n’est pas du genre à lever des lapins, il prend toujours le train en marche et jette la dernière pierre dans les termes les plus dégradants possible.

— Des comme lui, j’en ai vu plein dans ma vie. Un bon conseil – si tu veux bien en accepter un de moi –, ignore-le quand il s’excite, n’oublie jamais rien et rends-lui la monnaie de sa pièce quand tu en auras l’occasion. Mais pas maintenant qu’il attaque en position de force.

Mikael l’interrogea du regard.

— J’ai eu de nombreux ennemis au fil des ans. J’ai appris une chose, et c’est de ne pas accepter un combat quand tu es sûr de le perdre. Par contre, ne laisse jamais s’en tirer quelqu’un qui t’a démoli. Sois patient et riposte quand tu seras en position de force – même si tu n’as plus besoin de riposter.

— Merci pour ce cours de philosophie. Maintenant j’aimerais que tu me parles de ta famille. Mikael posa un magnétophone sur la table entre eux et appuya sur les boutons d’enregistrement.

— Qu’est-ce que tu veux savoir ?

— J’ai lu le premier classeur ; sur la disparition de Harriet et les recherches des premiers jours. Mais il y a tellement de Vanger que je n’arrive pas à les distinguer les uns des autres.

 

 

IMMOBILE DANS LA CAGE D’ESCALIER VIDE, Lisbeth Salander resta le regard fixé sur la plaque de laiton annonçant Maître N. E. Bjurman, avocat pendant près de dix minutes avant de sonner. La serrure de la porte émit son petit clic.

On était mardi. C’était la deuxième rencontre et elle avait de mauvais pressentiments.

Elle n’avait pas peur de maître Bjurman – Lisbeth Salander avait rarement peur des gens ou des choses. Elle ressentait par contre un profond malaise devant ce nouveau tuteur. Le prédécesseur de Bjurman, maître Holger Palmgren, avait été d’une tout autre trempe ; correct, poli et aimable. Leur relation avait brutalement pris fin trois mois auparavant, Palmgren ayant été frappé d’une attaque cérébrale. Du coup, Nils Erik Bjurman avait hérité d’elle selon une logique hiérarchique qui lui échappait.

Durant les douze années où Lisbeth Salander avait été l’objet de soins sociaux et psychiatriques, dont deux passées dans une clinique pédiatrique, elle n’avait jamais – pas une seule fois – répondu ne fût-ce qu’à la simple question « comment tu te sens aujourd’hui ? »

Lisbeth Salander avait treize ans quand le tribunal de première instance, selon la loi sur la protection des mineurs, avait décidé qu’elle serait internée à la clinique pédopsychiatrique Sankt Stefan à Uppsala. La décision s’appuyait principalement sur une note disant qu’elle présentait des troubles psychiatriques et qu’on la considérait comme potentiellement dangereuse pour ses camarades de classe et éventuellement pour elle-même.

Cette supposition était fondée sur des jugements empiriques plus que sur une analyse soigneusement établie. Chaque tentative des médecins ou d’une quelconque autorité pour engager une conversation sur ses sentiments, ses pensées ou son état de santé avait été accueillie, à leur grande frustration, par un silence compact et obtus, et un regard obstinément dirigé vers le sol, le plafond ou les murs. Elle avait systématiquement croisé les bras et refusé de participer aux tests psychologiques. Sa totale résistance à toutes les tentatives pour la mesurer, peser, cartographier, analyser et pour l’éduquer s’appliquait aussi au travail à l’école – les autorités pouvaient la transporter dans une salle de classe et l’enchaîner au banc, mais elles ne pouvaient pas l’empêcher de fermer les oreilles et de refuser de prendre un stylo en main lors des tests. Elle avait quitté le collège sans carnet de notes.

Le simple établissement d’un diagnostic sur ses contre-performances mentales s’était par conséquent avéré déjà des plus compliqués. Lisbeth Salander, en bref, était tout sauf maniable.

Elle était âgée de treize ans quand la décision avait été prise aussi de lui attribuer un administrateur ad hoc pour veiller sur ses intérêts et ses biens jusqu’à sa majorité. L’administrateur ainsi désigné était maître Holger Palmgren, qui malgré un début relativement compliqué avait réussi là où les psychiatres et les médecins avaient échoué. Petit à petit, il avait gagné non seulement une certaine confiance mais aussi une once de chaleur de la part de cette fille compliquée.

Pour ses quinze ans, les médecins s’étaient plus ou moins mis d’accord sur le fait qu’elle n’était pas violente et dangereuse pour l’entourage et qu’elle ne constituait pas un danger pour elle-même. Sa famille ayant été déclarée incompétente et comme elle n’avait personne d’autre qui pouvait se porter garant pour son bien-être, la décision avait été prise que Lisbeth Salander allait pouvoir quitter la clinique pédopsychiatrique d’Uppsala et rejoindre la société par l’intermédiaire d’une famille d’accueil.

L’opération ne fut pas simple. Elle fugua de chez sa première famille d’accueil dès la deuxième semaine. Les familles n°2 et n°3 passèrent rapidement à la trappe. Puis Palmgren eut un entretien sérieux avec elle et lui expliqua que si elle continuait sur le chemin qu’elle avait choisi, elle allait immanquablement se retrouver de nouveau dans une institution. La menace déguisée eut pour effet qu’elle accepta la famille d’accueil n°4 – un couple âgé habitant Midsommarkransen.

 

 

CELA NE SIGNIFIAIT PAS que son comportement était irréprochable. À dix-sept ans, Lisbeth Salander avait été arrêtée par la police à quatre reprises, deux fois dans un état d’ébriété si avancé qu’on dut la conduire aux soins intensifs, et une fois manifestement sous l’emprise de drogues. À l’une de ces occasions, on l’avait trouvée ivre morte et les vêtements en désordre sur la banquette arrière d’une voiture garée à Söder Mälarstrand. Elle était en compagnie d’un homme également ivre et considérablement plus âgé qu’elle.

La dernière intervention eut lieu trois semaines avant ses dix-huit ans, quand elle avait balancé un coup de pied dans la tête d’un passager à la station de métro de Gamla Stan. Elle était parfaitement sobre. L’incident eut pour conséquence une mise en examen pour coups et blessures. Salander expliqua son geste en disant que l’homme l’avait tripotée, et son apparence physique étant telle qu’on lui donnait plutôt douze ans que dix-huit, elle avait considéré que le tripoteur avait des penchants pédophiles. Dans la mesure où elle avait expliqué quoi que ce soit, s’entend. Ses déclarations furent cependant étayées par des témoins, et le procureur classa l’affaire.

Pourtant, fort des informations sur son passé, le tribunal avait ordonné un examen psychiatrique. Fidèle à ses habitudes, elle avait refusé de répondre aux questions et de participer aux examens, et les médecins consultés par la direction de la Santé et des Affaires sociales avaient fini par donner un avis basé sur « leurs observations de la patiente ». Savoir exactement ce qu’on pouvait observer quand il s’agissait d’une jeune femme muette, assise sur une chaise les bras croisés et faisant la moue était un peu flou. Il fut seulement établi qu’elle souffrait de troubles psychiques, de nature telle que des mesures s’imposaient. Le rapport médicolégal préconisait un internement d’office en clinique psychiatrique. Parallèlement, un sous-directeur de la commission des Affaires sociales fit un rapport où il se rangeait aux conclusions de l’expertise psychiatrique.

Se référant au palmarès de Lisbeth Salander, le rapport constatait qu’il y avait un gros risque d’abus d’alcool ou de drogue, et que manifestement elle manquait d’instinct de conservation. Son dossier était plein de termes catégoriques du genre : introvertie, socialement limitée, manque d’empathie, égocentrique, comportement psychopathe et asociale, difficultés de collaboration et incapacité d’assimiler un enseignement. Une personne lisant son dossier pouvait très facilement être amenée à tirer la conclusion qu’elle était gravement arriérée. Un autre fait lui portait également préjudice : l’équipe d’intervention des services sociaux l’avait à plusieurs reprises observée en compagnie de différents hommes aux environs de Mariatorget. Une fois, elle avait aussi été interpellée à Tantolunden, de nouveau en compagnie d’un homme considérablement plus âgé qu’elle. On supposait que Lisbeth Salander pratiquait ou risquait de commencer à pratiquer la prostitution sous une forme ou une autre.

Le jour où le tribunal de première instance – la juridiction qui devait déterminer son avenir – se réunit pour prendre une décision sur la question, l’issue semblait déterminée d’avance. Elle était manifestement une enfant à problèmes et il était peu vraisemblable que les magistrats suivent une autre voie que les recommandations données par l’enquête sociale et l’enquête de psychiatrie légale.

Au matin du jour où devait siéger le tribunal, on vint chercher Lisbeth Salander à la clinique pédopsychiatrique où elle était restée enfermée depuis l’incident à la station Gamla Stan. Elle se sentait comme un bœuf à l’abattoir et n’avait aucun espoir de survivre à la journée. La première personne qu’elle vit dans la salle d’audience fut Holger Palmgren et il lui fallut un moment avant de comprendre qu’il n’était pas là en sa qualité d’administrateur mais qu’il était son avocat et conseiller juridique. Elle découvrit alors un tout nouvel aspect de cet homme.

À sa grande surprise, Palmgren se trouvait manifestement dans son coin du ring et il avait vigoureusement plaidé contre la proposition d’internement. Elle ne manifesta aucune surprise, ne fût-ce qu’en levant un sourcil, mais elle écouta intensément chaque mot prononcé. Palmgren se révéla brillant pendant les deux heures où il interrogea le docteur Jesper H. Löderman, le médecin qui avait apposé sa signature sous la recommandation d’enfermer Salander dans une institution. Chaque observation du rapport fut passée au crible et le médecin fut prié d’expliquer le fondement scientifique de chaque affirmation. Peu à peu il devint évident que, puisque la patiente avait refusé de faire le moindre test, les conclusions des médecins n’étaient fondées que sur des suppositions et non pas sur une certitude.

Vers la fin des délibérations du tribunal, Palmgren laissa entendre que, selon toute vraisemblance, un internement coercitif non seulement s’opposait aux décisions du Parlement en matière d’affaires de ce genre, mais dans le cas présent pouvait aussi devenir un cheval de bataille pour les politiques et les médias. Il était donc dans l’intérêt de tous de trouver une solution alternative convenable. Un tel langage était inhabituel lors des délibérations dans ce type d’affaire et les membres du tribunal avaient manifesté une certaine inquiétude.

La solution fut effectivement un compromis. Le tribunal de première instance établit que Lisbeth Salander relevait de la maladie mentale, mais que sa folie ne nécessitait pas forcément un internement. En revanche, on prit en considération la recommandation du directeur des Affaires sociales concernant une mise sous tutelle. Sur quoi le président du tribunal se tourna avec un sourire venimeux vers Holger Palmgren, qui jusque-là avait été son administrateur ad hoc, lui demandant s’il voulait bien assumer ce rôle. Le président s’attendait de toute évidence à ce que Holger Palmgren fasse marche arrière et essaie de se décharger de la responsabilité sur quelqu’un d’autre, mais Palmgren déclara au contraire avec bonhomie qu’il se chargerait avec plaisir de la tâche d’être le tuteur de Mlle Salander – à une condition.

« Cela suppose évidemment que Mlle Salander ait confiance en moi et qu’elle m’accepte comme tuteur ».

Il s’était tourné directement vers elle. Lisbeth Salander était un peu perplexe après les échanges de répliques qui avaient fusé au-dessus de sa tête tout au long de la journée. Jusque-là, personne n’avait demandé son avis. Elle avait longuement regardé Holger Palmgren puis hoché la tête une fois.

 

 

PALMGREN ÉTAIT UN MÉLANGE étrange de juriste et de travailleur social de la vieille école. À ses débuts, il avait été délégué à la commission des Affaires sociales et il avait consacré presque toute sa vie à manier des gamins difficiles. Un respect à contrecœur, à la limite de l’amitié, s’était établi entre l’avocat et sa protégée incomparablement la plus difficile.

Leur relation avait duré en tout et pour tout onze ans, depuis l’année où Lisbeth avait eu treize ans jusqu’à l’année passée, lorsqu’elle s’était rendue chez Palmgren quelques semaines avant Noël, alors qu’il n’était pas venu à l’un de leurs rendez-vous fixes. Il n’avait pas ouvert la porte, alors qu’elle entendait des bruits dans l’appartement, et elle était entrée en escaladant une gouttière jusqu’au balcon du deuxième étage. Elle l’avait trouvé par terre dans le vestibule, conscient mais incapable de parler et de bouger après une attaque cérébrale. Il n’avait que soixante-quatre ans. Elle avait appelé l’ambulance et l’avait accompagné à l’hôpital avec une sensation grandissante de panique dans le ventre. Pendant trois jours et trois nuits, elle n’avait pratiquement pas quitté le couloir des soins intensifs. Tel un chien de garde fidèle, elle avait surveillé chaque pas des médecins et des infirmières qui passaient la porte dans un sens ou dans l’autre. Elle avait arpenté le couloir en long et en large et braqué ses yeux sur chaque médecin qui s’approchait d’elle. Finalement, un médecin, dont elle n’avait jamais su le nom, l’avait introduite dans une pièce et lui avait expliqué la gravité de la situation. L’état de Holger Palmgren était critique après une hémorragie cérébrale sévère. Il ne se réveillerait probablement pas. Elle n’avait ni pleuré, ni affiché le moindre sentiment. Elle s’était levée, avait quitté l’hôpital et n’y était jamais retournée.

Cinq semaines plus tard, la commission des Tutelles avait convoqué Lisbeth Salander pour une première rencontre avec son nouveau tuteur. Sa première impulsion avait été d’ignorer la convocation, mais Holger Palmgren avait soigneusement inculqué dans sa conscience que tout acte entraîne des conséquences. À ce stade, elle avait appris à analyser les conséquences avant d’agir, et en y réfléchissant elle était arrivée à la conclusion que l’issue la plus indolore du dilemme était de satisfaire la commission des Tutelles en se comportant comme si elle se souciait réellement de ce qu’ils disaient.

Elle s’était donc docilement présentée en décembre – une courte pause dans son enquête sur Mikael Blomkvist – au cabinet de Bjurman à Sankt Eriksplan, où une femme d’un certain âge, représentante de la commission, avait tendu le dossier volumineux à maître Bjurman. La dame lui avait gentiment demandé comment elle allait et avait semblé satisfaite de la réponse que constituait son silence obstiné. Au bout d’une demi-heure, elle avait laissé Salander aux bons soins de l’avocat.

Lisbeth Salander avait détesté maître Bjurman cinq secondes après lui avoir serré la main.

Elle l’avait regardé à la dérobée pendant qu’il lisait son dossier. Un peu plus de cinquante ans. Corps athlétique ; tennis les mardis et vendredis. Blond. Cheveux fins. Petite fossette au menton. After-shave Boss. Costume bleu. Cravate rouge avec épingle en or et des boutons de manchette fantaisie portant les initiales N.E.B. Lunettes cerclées d’acier. Yeux gris. À en juger par les magazines sur une table basse, il s’intéressait à la chasse et au tir au fusil.

Au cours des dix années où elle avait régulièrement rencontré Palmgren, il lui offrait du café et bavardait avec elle. Même ses pires fugues des familles d’accueil ou ses absences systématiques à l’école n’avaient pas réussi à le déstabiliser. La seule fois où Palmgren avait été véritablement hors de lui, c’était quand elle avait été mise en examen pour coups et blessures sur le gros dégueulasse qui l’avait tripotée dans le métro. Est-ce que tu comprends ce que tu as fait ? Tu as blessé un homme, Lisbeth. On aurait dit un vieux professeur et elle avait patiemment ignoré chaque mot de l’engueulade.

Bjurman n’était pas pour le bavardage. Il avait d’emblée constaté qu’il y avait incompatibilité entre les devoirs de Holger Palmgren selon le règlement des tutelles et le fait qu’il avait apparemment laissé Lisbeth Salander gérer elle-même son appartement et son budget. Il avait entrepris une sorte d’interrogatoire. Combien tu gagnes ? Je veux une copie de ta comptabilité. Qui est-ce que tu fréquentes ? Est-ce que tu paies ton loyer à temps ? Est-ce que tu bois ? Est-ce que Palmgren était d’accord pour ces anneaux que tu as sur la figure ? Est-ce que tu t’en sors question hygiène ?

Va te faire foutre.

Palmgren était devenu son administrateur ad hoc peu après que Tout Le Mal était arrivé. Il avait insisté pour la rencontrer au moins une fois par mois lors de rendez-vous fixes, parfois plus souvent. Depuis qu’elle était revenue à Lundagatan, ils étaient pratiquement voisins ; Palmgren habitait Hornsgatan à quelques pâtés de maisons de chez elle, et ils s’étaient régulièrement croisés et étaient allés prendre un café chez Giffy ou ailleurs dans le quartier. Palmgren n’avait jamais été importun, mais il était passé la voir quelques fois, avec un petit cadeau pour son anniversaire par exemple. Elle avait une invitation permanente pour venir le voir à n’importe quel moment, un privilège dont elle se servait rarement, mais ces dernières années elle avait passé les réveillons de Noël chez lui après la visite chez sa mère. Ils mangeaient du jambon de Noël et jouaient aux échecs. Ce jeu ne l’intéressait absolument pas, mais depuis qu’elle avait appris les règles, elle n’avait jamais perdu une partie. Palmgren était veuf et Lisbeth Salander avait considéré comme un devoir d’avoir pitié de lui et de sa solitude en ces jours de fête.

Elle estimait lui devoir ça, et elle payait toujours ses dettes.

C’était Palmgren qui avait sous-loué l’appartement de sa mère dans Lundagatan jusqu’à ce que Lisbeth ait besoin d’un logement personnel. L’appartement de quarante-neuf mètres carrés était décrépit et crasseux, mais ça lui faisait un toit.

Maintenant Palmgren était hors jeu, et un autre lien avec la société normale venait d’être coupé. Nils Bjurman était d’un autre genre. Elle n’avait pas l’intention de passer un réveillon chez lui. La toute première mesure du bonhomme avait été d’établir de nouvelles règles concernant l’accès à son compte en banque sur lequel était versé son salaire.

Palmgren avait gentiment fermé l’œil sur le régime des tutelles et l’avait laissée gérer elle-même son budget. Elle payait ses factures et elle pouvait utiliser son épargne quand ça lui chantait.

Elle s’était préparée pour la rencontre avec Bjurman la semaine avant Noël, et une fois face à lui elle avait essayé d’expliquer que son prédécesseur lui avait fait confiance et qu’elle ne l’avait jamais déçu. Palmgren l’avait laissée mener sa barque sans se mêler de sa vie privée.

— C’est justement là un des problèmes, répondit Bjurman en tapotant son dossier.

Puis il lui sortit un long discours sur les règles et les décrets administratifs concernant les tutelles, avant de l’informer qu’un nouvel ordre allait entrer en vigueur.

— Il t’a laissée agir à ta guise, n’est-ce pas ? Je me demande comment il s’est débrouillé pour ne pas se faire taper sur les doigts.

Parce que ça faisait quarante ans que le vieux s’occupait de gosses à problèmes, ducon !

— Je ne suis plus un enfant, dit Lisbeth Salander, comme si cela suffisait comme explication.

— Non, tu n’es pas un enfant. Mais j’ai été désigné pour être ton tuteur et, en tant que tel, je suis juridiquement et économiquement responsable de toi.

La première mesure de Bjurman fut d’ouvrir un nouveau compte en banque à son nom à lui, qu’elle devait indiquer à la compta chez Milton et qu’ils devraient dorénavant utiliser. Salander comprit qu’elle avait mangé son pain blanc ; désormais maître Bjurman allait régler ses factures et elle recevrait une somme fixe comme argent de poche chaque mois. Il attendait d’elle qu’elle lui fournisse les reçus de ses dépenses. Il avait décidé qu’elle recevrait 1 400 couronnes par semaine « pour la nourriture, les vêtements, les séances de cinéma et des trucs comme ça ».

Selon qu’elle choisissait de travailler beaucoup ou peu, Lisbeth Salander pouvait gagner pas loin de 160.000 couronnes par an. Elle aurait facilement pu doubler la somme en travaillant à plein temps et en acceptant toutes les missions que Dragan Armanskij proposait. Par ailleurs, elle avait peu de frais et ne dépensait pas beaucoup. L’appartement lui coûtait 2.000 couronnes par mois et, malgré ses revenus modestes, elle avait 90.000 couronnes sur son compte d’épargne. Dont elle ne disposait donc plus librement.

— C’est moi qui suis responsable de ton argent, expliqua-t-il. Il faut que tu mettes de l’argent de côté pour ton avenir. Mais ne t’inquiète pas ; je me chargerai de tout ça.

Je me suis chargée de moi-même depuis que j’ai dix ans, espèce de connard !

— Tu t’en sors suffisamment bien d’un point de vue social pour qu’on n’ait pas besoin de t’interner, mais la société est responsable de toi.

Il l’avait minutieusement questionnée sur ses tâches chez Milton Security. Instinctivement, elle avait menti sur son travail. La réponse qu’elle avait fournie était une description de ses toutes premières semaines au boulot. Maître Bjurman eut donc l’impression qu’elle préparait le café et triait le courrier – occupations adaptées à un individu un peu bas de plafond. Il parut satisfait de ses réponses.

Elle ne savait pas pourquoi elle avait menti, mais elle était persuadée qu’elle avait bien fait. Même si maître Bjurman avait figuré sur une liste d’espèces d’insectes menacées d’extinction, elle n’aurait pas beaucoup hésité à l’écraser sous son talon.

 

 

MIKAEL BLOMKVIST AVAIT PASSÉ cinq heures en compagnie de Henrik Vanger et il consacra une grande partie de la nuit et tout le mardi à mettre au propre ses notes et à assembler le puzzle de la généalogie des Vanger. L’histoire familiale qui ressortait des entretiens avec Henrik Vanger était une version franchement différente de celle donnée dans le portrait officiel de la famille. Mikael savait très bien que toutes les familles ont des squelettes dans le placard. La famille Vanger avait un cimetière entier.

À ce stade, Mikael fut obligé de se rappeler que sa mission réelle n’était pas d’écrire une biographie sur la famille Vanger, mais de percer à jour ce qui était arrivé à Harriet Vanger. Il avait accepté le boulot convaincu qu’en réalité il resterait à gaspiller une année le cul sur une chaise, et que tout le travail qu’il ferait pour Henrik Vanger ne rimait à rien. Au bout d’un an, il toucherait son salaire extravagant le contrat que Dirch Frode avait rédigé avait été signé. Le salaire véritable, espérait-il, serait l’information sur Hans-Erik Wennerström, que Henrik Vanger affirmait posséder.

Depuis son entretien avec Henrik Vanger, il commençait à se dire que l’année ne serait pas nécessairement perdue. Un livre sur la famille Vanger avait une valeur en soi – c’était tout simplement un bon sujet.

Qu’il puisse trouver l’assassin de Harriet Vanger ne lui venait pas à l’esprit une seule seconde – si toutefois elle avait réellement été assassinée et qu’elle n’ait pas été victime d’un accident absurde ou n’ait pas disparu d’une autre manière. Mikael était d’accord avec Henrik sur la quasi-invraisemblance qu’une fille de seize ans puisse disparaître de son plein gré et réussir à rester cachée de tous les systèmes de surveillance officiels pendant trente-six ans. En revanche, Mikael ne voulait pas exclure que Harriet Vanger ait fait une fugue, qu’elle ait peut-être rejoint Stockholm, et que quelque chose se soit passé en route – la drogue, la prostitution, une agression ou tout simplement un accident.

De son côté, Henrik Vanger était persuadé que Harriet avait été assassinée et qu’un membre de la famille était responsable – peut-être en collaboration avec un autre. La force de son raisonnement reposait sur le fait que Harriet avait disparu durant les heures dramatiques d’isolement de l’île alors que tous les yeux étaient braqués sur l’accident.

Erika l’avait bien signifié à Mikael : sa mission était plus qu’insensée si le but était de résoudre l’énigme d’un meurtre, mais il commençait à comprendre que le sort de Harriet Vanger avait joué un rôle central dans la famille et surtout pour Henrik Vanger. Qu’il ait tort ou raison, les accusations de Henrik Vanger portées contre ses proches étaient d’une grande importance pour l’histoire de cette famille. L’accusation était ouvertement formulée de sa part depuis plus de trente ans, et elle avait marqué les réunions de famille et créé des oppositions enflammées qui avaient contribué à déstabiliser le groupe. Un examen de la disparition de Harriet remplirait par conséquent une fonction sous forme de chapitre indépendant, et même comme fil rouge dans l’histoire de la famille – et les sources étaient abondantes. Un point de départ logique serait d’établir une galerie des personnages, que Harriet Vanger soit sa mission première ou qu’il se contente d’écrire une chronique familiale. C’était de cela qu’avait traité son entretien avec Henrik Vanger dans la journée.

La famille Vanger comportait une centaine de personnes, en comptant les enfants de cousins et les arrière-cousins de toutes les branches. La famille était si nombreuse que Mikael fut obligé de créer une base de données dans son iBook. Il utilisa le programme NotePad (www ibrium se), un de ces produits complets que deux gars de KTH à Stockholm avaient créés et qu’ils proposaient en shareware pour trois fois rien sur Internet. Rares étaient les programmes aussi indispensables à un journaliste investigateur, estimait Mikael. Chaque membre de la famille eut droit à sa propre fiche.

L’arbre généalogique pouvait être reconstitué avec certitude jusqu’au début du XVIe siècle, époque où le nom était Vangeersad. Selon Henrik Vanger, le nom était peut-être issu du hollandais Van Geerstad ; si tel était le cas, on pouvait encore remonter l’arbre généalogique jusqu’au XIIe siècle.

À une époque plus récente, la famille était établie dans le Nord de la France, et elle était arrivée en Suède avec Jean-Baptiste Bernadotte au début du XIXe siècle. Alexandre Vangeersad ne connaissait pas personnellement le roi, mais il s’était fait remarquer comme chef de garnison capable et, en 1818, il reçut le domaine de Hedeby en remerciement de longs et fidèles services. Alexandre Vangeersad était aussi pourvu d’une fortune personnelle qu’il avait utilisée pour acheter des étendues forestières non négligeables dans le Norrland. Son fils Adrian était né en France mais, à la demande du père, celui-ci vint habiter le coin perdu de Hedeby dans le Norrland, loin des salons parisiens, pour administrer le domaine. Exploitant les terres et les forêts selon de nouvelles méthodes importées du continent, il fonda l’usine de pâte à papier autour de laquelle Hedestad s’était développée.

Le petit-fils d’Alexandre s’appelait Henrik et il raccourcit le nom en Vanger. Il développa un réseau commercial avec la Russie et créa une petite flotte de goélettes marchandes assurant la liaison avec les pays baltes, l’Allemagne et l’Angleterre des aciéries au milieu du XIXe Henrik Vanger l’Ancien diversifia l’entreprise familiale et démarra une modeste exploitation minière et les premières industries métallurgiques du Norrland. Il laissa deux fils, Birger et Gottfried, les deux fondateurs des activités financières de la famille Vanger.

— Tu as une idée des anciennes lois sur l’héritage ? avait demandé Henrik Vanger.

— Ça n’entre pas particulièrement dans mes domaines de compétence.

— Je te comprends. Moi aussi, ça me laisse perplexe. Selon la tradition familiale, Birger et Gottfried étaient comme chien et chat – des concurrents légendaires pour le pouvoir et l’influence dans l’entreprise familiale. Cette lutte de pouvoir est devenue un poids menaçant la survie de l’entreprise, et leur père a décidé – peu avant sa mort – de créer un système où chaque membre de la famille aurait une part d’héritage dans l’entreprise. Cela partait probablement d’un bon sentiment, mais il en est résulté une situation intenable. Plutôt que de faire venir des gens compétents et des partenaires possibles de l’extérieur, nous nous retrouvons avec une direction composée de membres de la famille avec chacun un ou deux pour cent de droit de vote.

— La règle est valable encore aujourd’hui ?

— Tout à fait. Si un membre de la famille veut vendre sa part, ça doit se faire au sein de la famille. L’assemblée générale annuelle réunit aujourd’hui une cinquantaine de membres de la famille. Martin possède un peu plus de dix pour cent des actions. Moi, j’en ai cinq pour cent puisque j’en ai vendu entre autres à Martin. Mon frère Harald possède sept pour cent, mais la plupart de ceux qui viennent aux AG n’ont que un ou un demi pour cent.

— Je l’ignorais totalement. Ça fait très Moyen Age.

— C’est complètement insensé. Ça signifie que si Martin veut mener une certaine politique aujourd’hui, il est obligé de faire du lobbying à grande échelle pour s’assurer le soutien d’au moins vingt à vingt-cinq pour cent des copropriétaires. C’est un patchwork d’alliances, de divisions et d’intrigues.

Henrik Vanger poursuivit :

— Gottfried Vanger est mort sans enfants en 1901. Ou, pardon, il était père de quatre filles, mais à cette époque-là les femmes ne comptaient pas. Elles possédaient des parts, mais c’étaient les hommes de la famille qui touchaient les intérêts. Ce n’est que quand le droit de vote a été introduit, au milieu du XXe siècle, que les femmes ont pu assister à l’assemblée générale.

— Oh, en voilà, de bons radicaux !

— Ne te moque pas. L’époque n’était pas la même. Quoi qu’il en soit, le frère de Gottfried, Birger, avait trois fils – Johan, Fredrik et Gideon Vanger, tous nés à la fin du XIXe. On peut éliminer Gideon ; il a vendu sa part pour émigrer en Amérique, où nous avons toujours une branche. Mais Johan et Fredrik ont fait de l’entreprise le groupe Vanger moderne.

Henrik Vanger avait sorti un album de photos et montrait des clichés des personnages tout en racontant. Les photos du début du siècle dernier présentaient deux hommes aux mentons solides et aux cheveux bien plaqués sur le crâne, fixant l’objectif sans l’ombre d’un sourire. Puis il reprit :

— Johan Vanger était le génie de la famille, il fit des études d’ingénieur et développa l’industrie mécanique avec plusieurs nouvelles inventions qu’il fit breveter. L’acier et le fer devinrent la base du groupe, mais la société étendit ses activités à d’autres domaines, comme le textile. Johan Vanger mourut en 1956 et il avait alors trois filles – Sofia, Märit et Ingrid – qui furent les premières femmes à avoir automatiquement accès à l’assemblée générale du groupe.

L’autre frère, Fredrik Vanger, était mon père. L’homme d’affaires, le patron d’industrie qui transforma les inventions de Johan en revenus, c’était lui. Mon père n’est mort qu’en 1964. Il participa activement à la direction jusqu’à sa mort, même si, dès les années 1950, il m’avait abandonné la direction au quotidien.

Johan Vanger, contrairement à la génération précédente, n’a eu que des filles. Henrik Vanger montra des photos de femmes aux poitrines généreuses, arborant ombrelles et chapeaux à larges bords. Et Fredrik – mon père – n’a eu que des fils. Nous étions cinq frères en tout. Richard, Harald, Greger, Gustav et moi.

 

 

POUR ESSAYER DE S’Y RETROUVER dans tous les membres de la famille, Mikael dessina un arbre généalogique sur quelques feuilles A4 scotchées. Il inscrivit en gras le nom des membres présents sur l’île de Hedeby pour la réunion de famille en 1966, et qui donc, au moins théoriquement, pouvaient être liés à la disparition de Harriet Vanger. Mikael laissa de côté les enfants de moins de douze ans – il partait du principe que quel qu’ait été le sort de Harriet Vanger, il était obligé de mettre une limite à ce qui était plausible. Sans trop se poser de questions, il barra aussi Henrik Vanger – si le patriarche était impliqué dans la disparition de la petite-fille de son frère, ses agissements depuis les dernières trente-six années tenaient de la psychopathologie. La mère de Henrik Vanger, qui en 1966 avait l’âge honorable de quatre-vingt-un ans, pouvait raisonnablement être biffée aussi. Restaient vingt-deux membres de la famille qui, selon Henrik Vanger, devaient entrer dans le groupe des « suspects ». Sept étaient morts depuis et certains avaient atteint des âges respectables.

Mikael n’était cependant pas prêt à avaler sans autre forme de procès la conviction de Henrik Vanger selon laquelle un membre de la famille était responsable de la disparition de Harriet. Il fallait ajouter à la liste des suspects une série d’autres personnes.

Dirch Frode avait commencé à travailler comme avocat de Henrik Vanger au printemps 1962. Et quand Harriet avait disparu, « l’homme à tout faire » actuel, Gunnar Nilsson – qu’il ait un alibi ou pas –, avait dix-neuf ans, et de même que son père, Magnus Nilsson, était particulièrement présent sur l’île de Hedeby, tout comme l’artiste peintre Eugen Norman et le pasteur Otto Falk. Ce Falk, était-il marié ? Le fermier d’Östergården, Martin Aronsson, de même que son fils Jerker Aronsson, s’étaient trouvés sur l’île et à proximité de Harriet Vanger tout au long de son enfance – quelles étaient leurs relations ? Martin Aronsson, était-il marié ? Y avait-il d’autres personnes à la ferme ?

Quand Mikael eut inscrit tous les noms, le groupe en était arrivé à une quarantaine de personnes. Il finit par rejeter le marqueur d’un geste frustré. Il était déjà 3 h 30 du matin et le thermomètre indiquait toujours moins vingt et un degrés. La vague de froid semblait vouloir s’installer. Il aurait voulu se trouver dans son lit à Bellmansgatan.

 

Les hommes qui n'aimaient pas les femmes
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